jeudi 21 juillet 2011

Ecologica

J’ai lu ce livre il y a quelques semaines et j’aurais dû en parler pendant que j’étais encore tout imbibé de sa lecture. Je l'ai trouvé éclairant, sagace, enrichissant. Je l’avais dans ma bibliothèque depuis quelques mois, et c’est une émission de Daniel Mermet, consacrée à André Gorz (écouter ici) qui m’a décidé d’en entamer la lecture. ( je vous conseille vivement cette autre émission de Daniel Mermet consacrée à Cornélius Castoriadis… Très enrichissant. Ecouter ici).

Je vous propose ci-dessous des extraits, des petites phrases que j’ai notées au fil de la lecture de ce livre. Il faut savoir qu'il est le dernier de l’auteur. Il s’agit d’un recueil de textes et d’articles parus entre 1975 et 2007. Je vous en encourage vivement la lecture.

En prime, dessous, une jolie petite vidéo qui évoque la fin d'André Gorz et de sa compagne Dorine.


Lurbeltz


« La décroissance est donc un impératif de survie. Mais elle suppose une autre économie, un autre style de vie, une autre civilisation, d’autres rapports sociaux. En leur absence, l’effondrement ne pourrait être évité qu’à force de restrictions, rationnements, allocations autoritaires de ressources caractéristiques d’une économie de guerre. »


« La production est ainsi devenue, avant tout, un moyen pour le capital de s’accroître ; elle est avant tout au service des « besoins » du capital et ce n’est que dans la mesure où le capital a besoin de consommateurs pour ses produits que la production est aussi au service de besoins humains. Ces besoins, toutefois, ne sont plus des besoins ou des désirs « naturels », spontanément éprouvés, ce sont des besoins et des désirs produits en fonction des besoins de rentabilité du capital. »


« Aucun démagogue n’a encore osé prétendre que démocratiser le droit aux vacances, c’était appliquer le principe : Une villa avec plage privée pour chaque famille française. Chacun comprend que si chacune des treize ou quatorze millions de familles devait disposer ne serait-ce que que de dix mètres de côte, il faudrait 140 000 km de plage pour que tout le monde soit servi ! En attribuer à chacun sa portion, c’est découper les plages en bandes si petites – ou serrer les villas si prés les unes des contre les autres – que leur valeur d’usage en devient nulle et que disparaît leur avantage par rapport à une complexe hôtelier. Bref, la démocratisation de l’accès aux plages n’admet qu’une seule solution : la solution collectiviste. Et cette solution passe obligatoirement par la guerre au luxe, que constituent les plages privées, privilège qu’une petite minorité s’arroge aux dépens de tous. »


Quand la voiture a été inventée, elle devait procurer à quelques bourgeois très riches un privilège tout à fait inédit : celui de rouler beaucoup plus vite que tous les autres. Personne, jusque-là, n’y avait encore songé : la vitesse des diligences était sensiblement la même, que vous fussiez riches ou pauvres ; la calèche du seigneur n’allait pas plus vite que la charrette du paysan, et les trains emmenaient tout le monde à la même vitesse (ils n’adoptèrent des vitesses différenciées que sous la concurrence de l’automobile et de l’avions). Il n’y avait donc pas, jusqu’au tournant du dernier siècl, une vitesse de déplacement pour l’élite, une autre pour le peuple. L’auto allait changer cela : elle étandait, pour la première fois, la différence de classe à la vitesse et au moyen de transport. »


« La vérité, c’est que personne n’a vraiment le choix : on n’est pas libre d’avoir un bagnole ou non parce que l’univers suburbain est agencé en fonction d’elle – et même, de plus en plus, l’univers urbain. »


« La population directement « capital-productive » représente probablement moins de 10 % de la population active des pays dits développés. Ignacio Ramonet cite un chiffre qui en dit long à ce sujet : plus de 25 % de l’activité économique mondiale est assurée par deux cents multinationales qui emploient 0,75 % de la population mondiale . »


« Le travail salarié n’est pas seulement pour le capital le moyen de s’accroître, il est aussi, par ses modalités et son organisation, un moyen de dominer le travailleur. Celui-ci est dépossédé de ses moyens de travail, du but et du produit de son travail, de la possibilité d’en déterminer la nature, la durée, le rythme. »


« Le travailleur réduit à une marchandise ne rêve que de marchandise. »


« La revendication d’un revenu d’existence découplé du temps de travail et du travail lui-même n’est donc par une utopie. Au contraire, elle prends acte du fait que le « travail », tel qu’on l’entend depuis deux siècles n’est plus la force productive principale, le savoir vivant, ne peut être mesurée avec les étalons habituels de l’économie ni rémunérée selon le nombre d’heures pendant lesquelles chacun le met en œuvre. »

Ecologica, par André Gorz - éd. Galilée, 2008, 160 p., 25 euros.

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